Les auteurs de romans historiques font en général bien attention à ce genre de chose, car dans le cas ci-dessus cité, j’avoue avoir été choquée. Bien sûr, vu la teneur du propos, tout prête à croire que c’est un fait exprès, mais dans mon écriture, que j’ai souhaité très proche de la réalité, je ne me serai jamais permis un tel écart.
Mais si l’on ne définit pas l’anachronisme en tant que procédé rhétorique, il en reste que le risquons sans le vouloir : au moyen-âge, on ne mange pas encore de pomme de terre, rien ne va bon train et on ne fusille pas du regard. On philosophait à peine, et on ne pratiquait en outre aucune psychologie.
Et que dire de l’orange, mot qui apparut dans les écrits au XIXe siècle grâce à la découverte de la « pome d’orenge »… Mais alors, comment appelait-on cette couleur avant cela ? Là, ça devient pointu et peu de lecteurs se choqueraient si je parlais d’un coucher de soleil d’un bel orangé !
Vous pourrez donc constater que les auteurs de romans historiques ne sont dons pas au bout de leur peine, car en plus de vérifier les dates des événements, les naissances, les rubriques nécrologiques, le vocabulaire compte aussi parmi les éléments de recherche.
Donc, en plus d’étudier le lexique de l’époque, les tournures de phrases, les expressions il nous faut également faire attention au non-vocabulaire, non-tournures et non-expressions… Et parfois, au fil de nos recherches nous faisons de belles découvertes.
Par exemple : le haut du pavé… Que voilà une expression qu’il me faut utiliser dans un roman médiéval. Savez-vous pourquoi ?
Au moyen-âge, les rues et ruelles qui étaient pavées, plus hautes près des maisons avec un creux au centre de la rue. Ce système servant d’égout à l’air libre pour évacuer les eaux de pluie, mais aussi le contenu des seaux d’aisance que l’on jetait par la fenêtre…
Les piétons marchaient donc le plus près possible des maisons pour éviter de s’approcher du cloaque situé au milieu et recevoir des déjections sur la tête.
Les gens du peuple derniers devaient se décaler vers le centre et laisser le haut du pavé aux gens supposés être de la haute société. C’est ainsi que les gens qui tiennent le haut du pavé sont des personnes qui ont une situation sociale élevée ou qui en dominent d’autres.
Donc, par un souci d’authenticité dans mon roman, j’ai fait attention à tout cela, j’ai également réalisé un savant mixage entre la grammaire de l’époque et notre langage contemporain afin de rendre la lecture facile tout en laissant croire au lecteur que les gens s’exprimaient de cette façon. C'est alors que nous sommes plus facilement projetés dans un environnement médiéval. Entre nous, plutôt que de faire du « Jeanteulisme » dans mon écrit, j’ai préféré inventer quelques mots… Enfin, ce n’est pas moi, c’est mon personnage qui use d’un langage qui lui est propre...